Le blog de Nicolas de Rouyn

Bonjour.
Ceci est un blog dédié au vin et au monde du vin, qu'on appelle aussi le mondovino. Et à tout ce qui entoure le vin, les belles tables,
les beaux voyages, les tapes dans le dos et les oreilles tirées.
Cela posé, ce qu'on y lit est toujours de-bon-goût-jamais-vulgaire,
ce qui peut plaire à votre mère. Dites-le lui.
(Only dead fish swims in ze stream).
Les photos sont signées Mathieu Garçon, sauf mention. Pour qu'elles soient belles en grand, il suffit de cliquer dessus.
Au fait, il paraît que "l'abus d'alcool est dangereux pour la santé, à consommer avec modération".
Nicolas de Rouyn



mercredi 21 décembre 2016

French Soul, Oregon Soil

 De Vancouver à Portland, le gros avion vole à hauteur des volcans qui défilent dans les hublots. On est au printemps, mais les pentes des grands cônes, ces bizarreries géologiques, sont blanches des neiges éternelles. C’était le bout du voyage pour les immigrants partis à la conquête de l’ouest en suivant à peu près une cohérence climatique, ce qui deviendra l’Oregon Trail des plus belles histoires de cow-boys et d’Indiens. Nous, plus modestement, nous sommes partis à la découverte du pinot noir de cette North West Coast, sur les traces des pionniers bourguignons. Eux, c’était il y a trente ans, pas plus. Qu’importe, cet Ouest est fort, même en 2016.

La côte, ses eaux froides, ses baleines,
ses immensités désertes

L'Oregon, où, quoi, comment
L’Oregon est encadré à gauche par les eaux froides du Pacifique où passent les baleines, en bas par la Californie, ses vins célèbres et le Nevada, ses casinos. En haut, c’est l’état de Washington et Boeing et, à droite, l’Idaho et ses paysages de western. Le décor est planté entre influences océaniques, jours chauds et hivers pluvieux, tout est en place pour faire pousser du raisin. Ici, c’est un pays tempéré. Il pleut, il neige, il fait beau. Il y a un océan qui provoque des entrées maritimes malgré l’écran fait par les Cascades Mountains qui longent le Pacifique, il y a des vents, des humidités, mais des étés secs qui font toute l’histoire, sauf accident climatique comme en 2103 où des pluies dingues ont gravement perturbé les vendanges.

Chapitre 24
Le premier contact avec cet Oregon, désormais célébré comme l’autre pays du pinot noir, est téléphonique. Louis-Michel Liger-Belair, l’heureux propriétaire de parcelles mythiques au château de Vosne-Romanée, est consultant pour Mark Tarlov, un lawyer new-yorkais spécialisé dans le cinéma et qui a décidé de créer Chapter 24, un domaine dans les collines de Dundee, au cœur de l’histoire qui nous occupe. Il explique simplement que le succès du pinot noir là-bas est un hasard, que les sols volcaniques n’ont rien de commun avec les calcaires bourguignons. À quoi Michel Bettane ajoute que les premiers viticulteurs locaux sont surtout des déçus de la Californie, des diplômés de la célèbre université du vin californien U.C. Davis qui avaient envie d’aller voir ailleurs. Les contours se précisent. Ryan Hannaford est l’homme de Chapter 24, à la fois maître de chai et vigneron. Ce jeune Australien d’Adélaïde, rieur et travailleur, adore l’Oregon, le pinot noir et ses vins. Il est fier d’être là, cette aventure, créer un vin est un rêve d’œnologue. Ce vignoble qu’il gère compte 33 parcelles dont il extrait 90 échantillons différents qui, une fois assemblés, donneront sept cuvées, sept étiquettes, pour une production totale de 15 000 caisses de douze bouteilles. En Amérique, on compte en cases, en caisses. Il nous montre des vignes menées par ses soins en biodynamie. Des jardins de vignes, des modèles pour l’édification des étudiants en biodynamie, tant elles respirent la santé, même à l’œil nu. Il dit : « En biodynamie, il faut toujours avoir un coup d’avance. Si vous vous mettez à courir derrière la météo, vous avez perdu. » Ryan a commencé en 2007 avec Dominique Lafon au domaine Seven Springs et il considère que ce grand vigneron bourguignon, également consultant en Oregon, est son père spirituel. Il restera jusqu’en 2014 à ses côtés avant de rejoindre Chapter 24 et Louis-Michel Liger-Belair.

Nicolas et Jay
C’est une histoire de vieux copains d’université qui se recroisent vingt ans après pour lancer un projet de vignoble. Qui échoue. Mais en Amérique, on peut rebondir. L’un est Bourguignon, encore, et l’autre est Californien. L’un est un vigneron célèbre à Vosne-Romanée, digne héritier du grand Henri Jayer. L’autre est un producteur de musique, il a côtoyé les meilleurs. L’un et l’autre on jeté leur dévolu sur une petite vigne plantée en franc de pied en 1988, cinq hectares sur un coteau abrupt des collines de Yamhill-Carlton. C’est la nouvelle aventure de Jean-Nicolas Méo et de Jay Boberg. Un projet qui, en plus d’eux, réunit une douzaine d’investisseurs dont Méo-Camuzet, le vignoble détenu par Jean-Nicolas et ses sœurs en Bourgogne et qui comprend le très fameux Cros Parantoux. Il aurait pu choisir, comme son voisin de Vosne, de faire le consultant, mais non. « Vous savez la différence ? Le consultant vole en business et le propriétaire en classe éco. À part ça, autant être propriétaire. La vigne coûte le même prix qu’en Beaujolais, mais les vins se vendent bien mieux. » En effet, on s’aperçoit qu’il y a trois paliers de prix : 45, 65 et 95 dollars environ. Qui correspondent à des niveaux de qualité et de quantité bien sûr différents. Il y a aussi un important marché national qui n’a pas peur de payer un bon prix pour le vin. Les Américains n’ont pas cette ancienne culture française qui date d’un temps où le vin ne valait à peu près rien, une époque où le pain et le vin existaient main dans la main. Tout ceci est révolu, le pain et le vin se sont séparés et suivent d’autres trajectoires, mais les Français ne s’en rendent pas compte encore. En revanche, aux USA, les vignerons peuvent faire de bonnes affaires sans scandaliser le monde. Et pour les Bourguignons, avec 70 % des surfaces viticoles plantées en pinot noir, c’est un enracinement culturel facile à rejoindre. Jean-Nicolas Méo a lancé son Nicolas & Jay, première cuvée de sa marque Bishop Creek, début avril 2016 et il a été surpris par le succès rencontré par son vin tout neuf. 25 % de la production vendue le premier jour, c’est ébouriffant pour un vin inconnu et vendu 65 dollars hors taxes la bouteille. Du coup, il affiche un objectif de 5 000 caisses par an. Pour l’instant, c’est 1 800.

Jean-Nicolas Méo arpente son coteau
de vignes plantées "franc de pied"

« Les vins français ne sont pas chers » 
Qui dit ça ? C’est Rodolphe Louchart, Lillois importé en Oregon depuis 14 ans et devenu le responsable de Gran Moraine, le vignoble haut de gamme du groupe Kendall-Jackson aujourd'hui dirigé par Barbara Banke, la femme de Jess Jackson. Nous avions rencontré Jess, aujourd’hui disparu, dans sa propriété de la Sonoma, quelques mille kilomètres plus au sud. L’endroit s’appelle Vérité et le winemaker français, Pierre Seillan, y fait trois vins, des bêtes à concours, déjà sept fois 100 points Parker. Bref, chez les Jackson, il y a du niveau. Avec ses vins installés dans la fourchette 50-100 $, Rodolphe sait de quoi il parle quand il ajoute « à qualité équivalente ». Lui, il mise à fond sur la vente au caveau, le wine-club cher à la clientèle américaine. Si aujourd’hui, ces ventes ne représentent que 20 %, l’objectif est clairement désigné à 80 %. Il y parviendra parce que l’Amérique, c’est comme ça. Pour en être sûr, le meilleur vin de la gamme s’appelle La Première. Comme chez Air France.

Rose Rock, le nouveau vignoble des Drouhin, veillé par Mount Hood,
le grand volcan qui regarde toute la région.

Les grands frères et la petite sœur
Véronique Drouhin, la sœur, c’est elle qui fait le vin à Beaune comme à Dundee ou, maintenant à Roserock, le nouveau domaine de la famille dans les Eola-Amity Hills. Eux, ce sont ses frères. Philippe, l’aîné, qui gère tous les vignobles familiaux. Laurent, qui a développé le business aux USA, premier marché de la Bourgogne. Il vit à New-York. Frédéric, le benjamin, préside aux destinées de l’ensemble du groupe familial depuis Beaune. Ils ont aussi un père, Robert, qui donne toujours son avis éclairé et une mère qui tranche en cas de conflit ou, plus raisonnablement, de divergences. C’est Robert qui a inventé l’histoire « Les Drouhin en Oregon ». Il l’a fait de manière assez insidieuse en convaincant sa fille de s’y coller. D’abord, en l’envoyant en stage chez le grand précurseur du pinot en Oregon, créateur de la winery The Eyrie. Véronique se souvient : « Un jour, mon père me montre une photo d’un monsieur avec une grande barbe et il me dit que ce sont des gens très bien et que, donc, j’irai en stage chez eux. Moi, j’aurai préféré la Californie, évidemment. Je suis allé en Oregon. » En 1987, Robert emmène sa fille à Dundee, ils gravissent une colline plantée de blé. C’est David Lett, le fameux barbu du stage, Papa Pinot est son surnom, qui a prévenu Robert Drouhin de l’opportunité d’achat. L’affaire se fait et voilà Véronique lancée dans le grand inconnu oregonnais avec une belle cinquantaine d’hectares à faire croître et embellir. Rapidement, mais au rythme de la vigne, le domaine Drouhin prend sa vitesse de croisière, trois cuvées voient le jour qui portent les prénoms des enfants de Véronique. Arthur est un chardonnay. Laurene est une cuvée de pinot noir et Louise, une autre, plus qualitative, embouteillée seulement en cas de grand millésime et vendue uniquement via le Wine Club de Drouhin Oregon. Un wine-club, c’est une réunion d’amateurs des vins d’une maison qui ont accès à toutes sortes d’avantages, dont certaines cuvées introuvables ailleurs ou des mises dans des formats hors commerce (magnums et au-dessus). C’est un principe très américain, largement reproduit dans toutes les wineries et dont nos domaines et châteaux français feraient bien de s’inspirer. Le temps a passé. Les aléas climatiques qui frappent depuis des années maintenant le grand talus bourguignon posent le problème de la fourniture de bons, voire de très bons vins issu du pinot noir à un marché global de plus en plus demandeur. C’est pour apporter un commencement de réponse à leur échelle que les Drouhin se sont portés acquéreurs d’un terroir d’exception dans les collines d’Eola Amity, au sud de Dundee. Un grand coteau orienté vers le sud-est avec le Mount Hood qui ferme l’horizon, comme le Mont-Blanc à Givry, mais plus proche, une belle forêt pour la biodiversité et quelques étangs pour humidifier légèrement l’atmosphère, l’été. On voit tout de suite que cet endroit est fait pour la vigne et nos spécialistes ne s’y sont pas trompés. Le lieu est tellement bourguignon (toutes proportions américaines gardées) qu’ils y ont planté une flèche qui indique « Beaune, 8 250 km ». Tout est dit.



Tout ceci a commencé il y a trente ans sous la bannière French soul, Oregon soil inventée par les Drouhin et, aujourd’hui, voilà qu’une autre grande maison du négoce beaunois, Louis Jadot, s’intéresse à l’Oregon, s’y installe. L’histoire continue, plus forte, plus belle encore, si possible.


 

Le commentaire de dégustation de Michel Bettane 
Roserock, Eola-Amity Hills 2014, pinot noir, Domaine Drouhin Oregon
« Un joli pinot noir fait avec soin en refusant tout caractère emphatique, exagéré. Un vin très équilibré à la texture soyeuse, frais sur des notes classiques de petits fruits rouges. Il est encore discret au nez avec un très réel potentiel de développement. Mais il est plus marqué par la qualité du raisin que par celle du terroir. Il manque encore de cette personnalité Drouhin d’Oregon comme avec leurs cuvées de Dundee. Mais c’est une première vendange, c’est un premier millésime et tout ceci semble bien parti. »



Les AVA des Américains
L’Amérique a aussi ses AOC, qu’on appelle AVA pour American Viticulture Area. L’endroit qui nous occupe ici est l’AVA de la Willamette Valley qui se subdivise en six sous-AVA :
Dundee Hills
Eola-Amity Hills
McMinnville
Yamhill-Carlton
Ribbon Ridge
Cheahalem Mountains
La Willamette est la rivière qui qui irrigue la région des AVA décrites ci-dessus.
C'est un affluent de la Columbia.


Sur le sujet, lire aussi ici (clic) et là (clic) ou là (clic)


Ce texte a été publié sous une forme différente dans ENMAGNUM n° 5.  
Toutes les photos sont signées Mathieu Garçon sauf la bouteille (Fabrice Leseigneur) et le panneau "Beaune" (mon Ni-Phone).
Voici ENMAGNUM #06, en vente chez votre marchand de journaux depuis quelques jours :



vendredi 16 décembre 2016

Mes magnums (27)
un champagne rosé surnaturel



Charles Heidsieck,
champagne rosé 2006 


Ce qu’il fait là
Je ne conçois pas une cave à vins où il manquerait quelques bruts blancs ou, comme ici, rosés de Charles Heidsieck, cette marque iconique, véritable cri de ralliement de tous les grands amateurs. En magnum, le bonheur est total.

Pourquoi on l’aime
Parce que c’est un des plus grands vins qui se puisse trouver. Élaboré par l’épatant Régis Camus et son regretté successeur, Thierry Roset, aussi talentueux. C’est extraordinairement agréable à boire. C’est un champagne d’un raffinement rare dans un registre pâtissier qui mêle le brioché aux fruits rouges. Une dentelle, mais de Reims. Le rosé des rosés.

Combien et combien
Quantité produite tenue secrète
(ben pourquoi ?).
175 euros, le magnum (chez Lavinia).

Avec qui, avec quoi
Avec les gens qu’on aime le plus. Ce qui peut faire un échantillonnage assez large, d’où la nécessité du magnum, au moins.

Il ressemble à quoi
Une sorte d’aboutissement, la fin de la route, ce moment unique où on est enfin sûr de quelque chose. J’ai toujours l’impression que peu de gens sont fans des champagnes Charles Heidsieck, j’ai peur d’avoir raison. En même temps, les fans que je connais sont des inconditionnels. C’est bizarre, la vie.

La bonne heure du bonheur
C’est bon tout le temps, dés maintenant et dans dix ans, du soir au matin et parfois, du matin au soir. De l’apéritif au dessert.

Le bug
On n’en vend pas partout.

Ce qu’en dit le Bettane+Desseauve 
Une dimension aérienne quasi surnaturelle, une finesse aromatique éblouissante, une tendreté profonde et longue.



Ce texte a été publié sous une forme différente dans ENMAGNUM n° 5.
Il fait partie de la série "Interviews de magnums".

Toutes les photos de cette série sont signées Fabrice Leseigneur.

Voici ENMAGNUM #06, en vente chez votre marchand de journaux depuis quelques jours :

samedi 10 décembre 2016

Mes magnums (26)
Le pape des graves


Pape-clément, grand cru classé pessac-léognan rouge 1986 

Ce qu’il fait là 
1986, millésime de trente ans bientôt, est celui du renouveau du château Pape-Clément. Celui qui signe l’arrivée aux commandes d’un grand propriétaire. Tant il est vrai que si tout le monde compte au moment d’élaborer un grand vin, c’est le propriétaire qui rend tout possible. Et 1986 est une grande bouteille confirmée par nos experts.

Pourquoi on l’aime
On aime ce pape-clément comme on aime Bernard Magrez. Avec tendresse, mais sans compromission, comme il sied aux grandes relations. On aime ce pape-clément comme on aime le bordeaux, pour tous les souvenirs, l’image du père et cette idée préoccupante qu’un grand bordeaux n’a pas d’équivalent à la fin.

Combien et combien
Quantité encore disponible non communiquée.
337,10 euros le magnum.

Avec qui, avec quoi 
Avec des amateurs qui ne vous feront pas sentir que le bordeaux, vraiment. Des gens raffinés, capables de comprendre ce que c’est qu’un grand vin (pas très grand public, tout ça).

Il ressemble à quoi
À l’idée supérieure qu’on peut se faire d’un grand bordeaux, un vin immense, avec de la branche et un avenir. Vous ne savez pas ce que c’est ? Essayez, c’est une expérience qui vous habitera toute votre vie. En même temps, un château qui a fait ses premières vendanges en 1252, on se dit qu’à force, le vin est au point.

La bonne heure du bonheur 
Autant de finesse, d’accomplissement ne dirige pas forcément vers la table. Il y a des vins qu’on goûte lentement, après le dîner pour la découverte, l’analyse, le plaisir du plaisir (un concept qu’on expliquera un autre jour)

Le bug 
Forcément, un flacon rare. À boire donc avec infiniment d’attention.

Ce qu’en dit le Bettane+Desseauve 
Le Guide Bettane+Desseauve n’existait pas quand ce vin est sorti. Rappelons que ce guide n’existe que depuis 1996 et que, chaque année, il juge les vins en cours de commercialisation.


Ce texte a été publié sous une forme différente dans ENMAGNUM n° 5.
Il fait partie de la série "Interviews de magnums".

Toutes les photos de cette série sont signées Fabrice Leseigneur.

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mardi 6 décembre 2016

Mes magnums (25)
un prince argentin

Cheval des Andes 2009, Argentine 

Ce qu’il fait là
Il arrive de Mendoza au triple galop. Fruit d’un rapprochement entre Terrazas de los Andes et Cheval Blanc à Saint-Émilion, Cheval des Andes est né pour être le premier grand vin argentin. Mais chacun de ses voisins s’efforçant avec la même opiniâtreté, ils sont aujourd’hui quelques-uns dans la course, dont les meilleurs du Clos de Los Siete.

Pourquoi on l’aime
L’encépagement bordelais (cinq cépages) donne au vinificateur une sorte d’éventail des possibles très inhabituel. Ce 2009 assemble une majorité de malbec à une bonne dose de cabernet-sauvignon et une touche de petit verdot.

Combien et combien
Quantité produite inconnue (de nous). 170 euros le magnum, quand on en trouve.

Avec qui, avec quoi
Inutile de parler espagnol, mais avoir bu de beaux cahors avant est un plus pour saisir la présence (et l’intérêt) du malbec.

Il ressemble à quoi
On n’est pas loin d’un super-bordeaux. Intellectuellement, déjà. Et ayons une pensée pour le système d’irrigation hérité des Incas. Sans ces milliers de tout petits canaux qui transportent l’eau descendue des Andes, il n’y aurait pas de vin à Mendoza.

La bonne heure du bonheur
Un vin puissant et complexe comme celui-là, à 14,4 ° d’alcool, c’est plutôt fait pour le soir.

Le bug
Qui en vend en France ?

Ce qu’en dit le Bettane+Desseauve
Il n’en dit rien. Rappelons que le Guide Bettane + Desseauve ne traite que les vins français.



Ce texte a été publié sous une forme différente dans ENMAGNUM n° 5.
Il fait partie de la série "Interviews de magnums".

Toutes les photos de cette série sont signées Fabrice Leseigneur.

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mardi 29 novembre 2016

Les (très) vieux millésimes du dîner Bouchard

Chaque fois, c’est la même chose. Ce dîner se tient pendant le week-end de la vente des Hospices de Beaune, aujourd’hui menée par les experts de Christie’s. Et chaque année, ou presque, c’est l’occasion de boire au moins un millésime du XIXe siècle. On retrouve là ce que le monde compte de dégustateurs, de journalistes, d’importateurs, de grands amateurs dans une petite foule d’une trentaine de convives. Ils entourent l'équipe de la maison Bouchard Père et Fils et le dîner se tient dans l’orangerie du château de Beaune, propriété historique de la maison. C’est dans une ambiance très cosmopolite – le dîner Bouchard est polyglotte – que plusieurs vins prodigieux vont être bus à table. Comme chaque fois, le dîner fait suite à la dégustation des vins nouveaux. Cette année, 2015.

Après une longue adresse complète et précise de Frédéric Weber, le maître de chai, sur les conditions climatiques du millésime, place aux rouges. 
Les rouges montrent des couleurs joyeuses et, dès le second vin, un monthélie, on comprend qu’on met le nez dans le monde des belles cuvées. Passage par une sorte de « master blend » superlatif, le beaune-du-château, un assemblage de 17 premiers crus. Chez Bouchard, il n’y a que quatre crus qui sont embouteillés sous leur nom : les-marconnets, teurons, clos-de-la-mousse et la vigne de l’enfant-jésus, le beaune-grèves de la maison. D’entrée, la barre est placée très haut, comme le millésime. Le volnay-caillerets et le vigne de l’enfant-jésus ne joue pas dans la cour de l’ultra-mûr, ce sont des vins d’une grande délicatesse qui ne réclame pas des maturités exubérantes. Après un corton qui promet beaucoup, mais qui est rentré dans sa coquille pour le moment, on est passé au magnifique nuits-saint-georges les-cailles. C’est, plus encore que l’enfant-jésus, mon vin préféré dans la gamme Bouchard. C’est avec ce vin que l’on comprend qu’il existe d’autres mondes du vin, d’un raffinement rare qui nous parle d’élégance, de ciselé, de longueur. Le roi chambertin viendra sous forme d’un clos-de-bèze issu d’un hectare seulement, un vin prodigieux dont je ne connais pas toutes les facettes ni tous les producteurs, mais en assemblant plusieurs avis, on comprend que celui-là est l’égal des plus grands. À la fin, Michel Bettane emplira un grand verre avec quelques gouttes de chacun des vins et partage l’idée avec chacun, « une bonne façon de comprendre le millésime » et là, c’est la profondeur qui démontre tout, dit-il.

Les blancs sont au nombre de neuf, du bourgogne générique au montrachet. Là encore, Frédéric Weber parlera des maturités en utilisant le terme de
« maturité vraie des chardonnays » en évoquant la couleur dorée des baies, tard en septembre. Sans entrer dans tous les détails, ces blancs franchissent presque tous les portes de la complexité. Le gras et l’aromatique, l’ampleur et la persistance, tout ce qui compte est là, avec infiniment d’allure, de classe même. Et comme la courbe des tarifs suit celle des qualités, c’est facile de ne pas se tromper. Somptueux final avec le chevalier et ses arôme exotiques, le montrachet et sa profondeur abyssale. Nous n’avons pas goûté cette année la-cabotte, un chevalier plus fin qu’un montrachet.



Le dîner peut maintenant commencer. Après un plongeon voluptueux dans quelques magnums de Cuve 38, la réserve perpétuelle (ou solera) des champagnes Henriot, autre affaire familiale, un premier corton-charlemagne 2000 prend tout le monde de court, après seize années le vin est encore trop jeune. Ouf, des magnums du millésime 1955 viendront à son secours. Il faudra juste avoir la bonne idée d’en garder un verre pour la fin du dîner quand température et ouverture se ligueront pour rendre l’amateur fou de bonheur, ce qui s’est passé. Viendra un émouvant enfant-jésus 1949 dont chaque bouteille évoquera des délices différents, chacune a sa vie propre, c’est le jeu des vins anciens, il n’y a plus de grands vins, il n’y a que de grandes bouteilles. Le clos-de-la-mousse 1864 qui suit n’échappe pas à la règle. La première bouteille, parfaitement somptueuse, fraîcheur de fou et aromatique surprenante fera dire à Bettane « C’est un vin non égrappé qui a sans doute épaté les gens qui l’ont fait naître. » Pour les autres, la plus grande surprise est de boire un 1864 qui est un vin avec toutes les caractéristiques attendues, 150 ans après, il y a du vin dans le verre et il est bon, c’est bien là l’extraordinaire. Pas exactement la bombe de fruits chère aux jobards, mais des complexités branchées sur l'infini. L'émotion est grande, ce vin est un scud et Bettane d’ajouter : « En 1864, on savait déjà tout. Il s’agit maintenant d’inventorier ce qu’on a oublié. » Le malaga 1859 servi à la fin du dîner démontrera son imposante jeunesse, cette sorte de porto est frais comme l’œil, à l’instar de tous les vins qui sortent des incroyables caves du château de Beaune.



2015 est fait pour durer et la maison Bouchard en gardera beaucoup, plusieurs milliers, pour l’édification des générations futures et au prorata des superficies de chaque terroir. Cet usage ancien chez Bouchard permet à la maison d’être aujourd’hui à la tête d’un stock énorme de millésimes des XIXe, XXe et XXIe siècles, « un patrimoine unique de grands vins anciens et buvables », on parle de plus de 200 000 bouteilles. Ainsi, quand on procède tous les trente ou quarante ans au changement des bouchons, c’est avec du vin du même millésime qu’on « refait les niveaux », une pratique assez peu partagée. D’ordinaire, on remet du vin plus récent histoire de doper le vieux millésime.
Et c’est sans vraiment entamer le trésor que Bouchard peut se permettre de mettre deux mille vieux et très vieux millésimes sur le marché des ventes aux enchères, comme à Hong Kong l’été dernier, avec le succès que l’on sait.






jeudi 24 novembre 2016

- EN MAGNUM, voilà le numéro 6
- Quoi, déjà ?

Oui, déjà près de 18 mois d’existence pour le magazine de Bettane+Desseauve au succès duquel j’ai le plaisir de contribuer. Après des débuts chaotiques – comme souvent – le magazine a trouvé un tempo qui nous ressemble.
Le 6, donc. 
Au premier regard, on comprend que Noël approche, le magnum de R.D. 1973 dans la neige, le doré sur la Une, le doute n’est pas permis. Une grande dégustation de liquoreux est aussi une preuve de fêtes à venir surtout quand elle est agrémentée d’un grand papier de Michel Bettane sur la pourriture noble dont je recommande la lecture attentive à chacun de nos lecteurs qui veut s’endormir chaque soir plus intelligent qu’il ne s’est levé.
Et puisque c’est le temps des fêtes, des magnums, des liquoreux, c’est évidemment la place du champagne. C’est Thierry Desseauve qui signe un sujet important et décrit l’histoire immédiate de ce phénomène planétaire qu’on a tout à gagner à lire aussi.
Et il y a tout le reste, des portraits de vignerons, des adresses et des idées, des photos panoramiques belles et passionnantes, les accords mets-vins d’Antoine Pétrus, un sujet sur la difficulté de transmettre des vignes hors de prix en Bourgogne par Laurent Gotti, grand spécialiste de la Bourgogne, un autre sur les mystères des bulles dans le verre avec le Champenois Liger-Belair, la BD de Régis Franc (qui continue avec nous en 2017, ça m’enchante) et la dernière page, les Parisiens de Margot, qui, elle, nous quitte. La blogueuse est inconstante, certes, mais là, elle a trouvé un « vrai » boulot, donc nous lui pardonnons et merci d’avoir fait ces quatre derniers numéros avec nous. Et, comme toujours, les plus belles gueules du vignoble photographiées par Mathieu Garçon.

En Magnum n°6, c’est une fois de plus, un assemblage équilibré d’infos, d’émotions, d’histoires, de dégustations, d’humeurs et d’opinions, de moqueries, de débats, de portes qui claquent et de fenêtres qui s’ouvrent, la vie, quoi.
En Magnum n°6, c’est tout le vin, juste un peu plus grand.

En vente chez votre marchand de journaux à partir de demain, vendredi 25 novembre



La photo de Une est signée Fabrice Leseigneur

mercredi 23 novembre 2016

Grand Tasting
La onzième fois, c’est comme la première fois

Parmi les 350 producteurs présents, il y a quelques très beaux cognacs

Dix ans et la onzième année. Une décennie a passé et tout recommence, le dixième anniversaire sonnait de belle manière et la fin d’un cycle. Recommencer, donc. Pour la onzième fois. Le Grand Tasting numéro onze. D’abord, mais nous n’y sommes pour rien, changement de décor. Le Carrousel du Louvre change de tête. Finie la mezzanine que nous avions baptisée « Paradis ». Aussi, l’époque criseuse a écarté certains de nos grands amis du Grand Tasting 2016. Nous les retrouverons à meilleure fortune, aussi vite que possible. D’autres sont venus.

Un tout petit morceau du Grand Tasting


Le Grand Tasting n° 11 est-il différent des éditions précédentes ? Mais non, mais si. Non, parce que le format épatant ne manque de rien. Oui, parce que le décor change, les ténors aussi, votre tête et la mienne, également. Ce monde en effervescence signe un onzième Grand T en forme d’accomplissement. Le public, une fois encore, fera la fierté des organisateurs, un peu plus pointu, un peu plus passionné, un peu plus intéressant, un peu plus jeune
. Les exposants, comme toujours, auront tout ce qu’il faut pour que le plaisir y soit. Chacun repartira content, des étoiles dans les yeux parce que c’est ça, à la fin, le Grand Tasting.

C'est une bonne idée de préparer son Grand T avant de venir.
Passez par le site grandtasting.com pour choisir ceux que vous ne voulez absolument pas rater.

Le Grand Tasting ouvre ses portes vendredi (10:30 – 19 :00) et samedi (10:30-18 :00).
Happy you.





Autre chose : le numéro 6 de En Magnum est en vente chez votre marchand de journaux à partir de vendredi (le 24 novembre).


jeudi 10 novembre 2016

David Hockney signe l'étiquette de mouton 2014

Chaque millésime du premier cru classé Mouton-Rothschild voit son étiquette recevoir l'œuvre originale d'un artiste de haut niveau. Pour 2014, c'est David Hockney qui met l'étiquette en scène. L'artiste est immense, l'égal de Warhol ou de Hopper, c'est le roi du Pop-Art. Une grande rétrospective à lui consacrée devrait passer par le centre Pompidou à Paris en 2017.
Comme c'est joliment dit dans le dossier de presse, reprenons les termes sans y rien changer :
« Entourés de rayons, signes à la fois d’émotion et d’émerveillement, deux verres, l’un vide et l’autre plein, nous racontent l’attente fébrile, puis le miracle toujours recommencé de la naissance d’un grand vin. »

Et voilà le travail :


vendredi 4 novembre 2016

J’ai bu du vin nature au Laurent

C’était mercredi, dans la pâle lumière d’un joli soleil d’hiver qui envahissait la table en jouant avec les nuages. Un déjeuner tout près du bonheur parfait avec notre cher Henry Marionnet, l’un des plus brillants vignerons de France. Il voulait absolument que nous goûtions son vin le plus fou, un gamay en primeur issu de vignes plantées franc de pied (non greffée) et vinifié sans soufre ajouté. Une sorte de course en sac avec un pied attaché dans le dos. Évidemment, si nous sommes là, c’est que Marionnet est sûr de son coup, de sa « grande première mondiale ». Il a tiré 6 000 bouteilles de sa parcelle de 1,3 ha.


Ce fameux vin de Marionnet dans la sublime lumière de la salle à manger du Laurent.
Sublime et même unique.
La grande salle à manger est calme, il y a u peu de monde, mais ce n’est pas comble. On reconnaît un visage ou deux, ce n’est pas comme au printemps sur la terrasse où le type le moins connu, c’est vous. Ou moi. Les coups portés au tourisme international à Paris font leur effet et ce n’est pas en cette période pré-électorale que les politiques se font voir au Laurent. Nous, nous y sommes et nous y sommes bien.
L’une des raisons qui me poussent à apprécier Henry Marionnet, ses vins, tient dans son enthousiasme de jeune homme, cette manière unique de créer des trucs, d’aller voir, sa passion inextinguible pour le vin et comment le comprendre et celle, plus mystérieuse, qui l’emmène à la recherche du vin d’avant, du vin des premiers siècles ou des suivants, mais des vins tels que les vignerons d’avant le Progrès les élaborait à l’attention à peu près exclusive des grands de ce monde-là. Une démarche qui lui a permis de découvrir de drôles de vignobles avec des arbres morts autour desquels s’entouraient la vigne, les vendanges avec des échelles, il les a faites.

- Et c’était bon, ce vin, Henry ?
- Non, pas très, ce n’était pas un grand vin, mais c’est la dernière vigne de goué, tu comprends. Ce cépage a disparu quand le monde s’est mis à aller mieux. On le cultivait pour produire du vin en toutes circonstances, quelle que soit la météo. Un coriace comme ça ne pouvait pas être un grand cépage fin. C’est un blanc.


Le voilà, ce vin, cette "première mondiale".
Son gamay franc de pied sans soufre est à la bonne température, Henry Marionnet recommande 12°C. C’est un vin d’une bonne couleur tenue, mais sans exagération, un vin vif, joyeux, tonique, gouleyant, incroyablement digeste, très bon, léger en alcool (12,5 %), du beau gamay facile et très agréable. C’est gourmand, c’est subtil. Quoi d’autre ? Buvez-en, parce que tout ça n’est même pas cher.

En plus, c’était mon premier 2016. Et au Laurent. Quelle journée.


mercredi 12 octobre 2016

Mes magnums (24)
un vacqueyras bio

Domaine Montirius, cuvée Minéral, vacqueyras 2012 



Ce qu’il fait là 
Un blanc d’été, c’est pour ça. Un blanc d’un pays de rouges. Un blanc élevé à l’abri des Dentelles de Montmirail. Un blanc, quoi.

Pourquoi on l’aime 
Sur moins de deux hectares, le domaine produit ce vin élevé en bouteille (ou en magnum), mais pas sous bois, qui devient très élégant avec une finale légèrement saline. Bref, le vin qui donne faim et soif.

Combien et combien 
300 magnums. 51 euros le magnum.

Avec qui, avec quoi 
La palette aromatique de ce vin lui permet de se promener d’un bout à l’autre d’un dîner en ayant assuré l’apéritif, en plus.

Il ressemble à quoi 
Il ressemble à ces ambiances de Provence rurale, de pré-montagne, de piémont. On sent le contrefort. Il y a des tracteurs sur les routes.

La bonne heure du bonheur 
Il faut l’attendre. Un minimum, mais quand même l’attendre. Disons trois ans.

Le bug 
Ces toutes petites productions ne se trouvent sans doute qu’au domaine.

Ce qu’en dit le Bettane+Desseauve 
La clairette s’exprime avec réserve et subtilité. Savoureuse expression minérale, bouche élancée avec de la suite terminant sur des amers de gastronomie.
16,5/20


Ce texte a été publié sous une forme différente dans ENMAGNUM numéro 4.
Il fait partie d'une série de onze "interviews de magnums".

Toutes les photos de la série Mes magnums sont signées Fabrice Leseigneur.

Voici ENMAGNUM #05, en vente chez votre marchand de journaux depuis quelques jours :

lundi 10 octobre 2016

Mes magnums (23)
un corbières-boutenac bio

Château de Caraguilhes, cuvée Solus, corbières-boutenac 2013 



Ce qu’il fait là 
C’est un vin du désert des Corbières, produit dans une propriété sauvage en surplomb d’une vallée de vignes et de bosquets. C’est d’une beauté de commencement du monde. Vous n’irez pas, vous devriez.

Pourquoi on l’aime 
Parce que les 100 hectares de vignes menées en bio donnent des vins qui ont le goût des 500 hectares de garrigues au milieu desquels s’épanouit un raisin fort de toute cette diversité.

Combien et combien 
198 magnums. 42 euros le magnum.

Avec qui, avec quoi 
Avec une gastronomie de terrien qui n’a pas peur de son ombre. Un vin dense, intense, profond, sombre a besoin d’une assiette qui lui réponde.

Il ressemble à quoi 
Au sanglier aperçu au détour d’un rang de vignes à Caraguilhes. En plus aimable.

La bonne heure du bonheur 
Le soir, à table. Sans pincer le nez, c’est du vin, du vrai.

Le bug 
J’ai bien peur qu’on n’en trouve pas partout.

Ce qu’en dit le Bettane+Desseauve 
Un vrai boutenac tout en saveurs, en délicatesse et équilibre. Le nez raffiné offre un beau fruit, des notes épicées et de fleurs suaves, la bouche est charnue, aromatique et très fraîche.
14,5/20


Ce texte a été publié sous une forme différente dans ENMAGNUM numéro 4.
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jeudi 6 octobre 2016

Mes magnums (22)
un chablis, un beau chablis

Château de Béru, cuvée Côte aux prêtres, chablis 2014 



Ce qu’il fait là 
Un chablis de belle origine a sa place dans toutes les portes de frigo. Il y a très peu d’occasions qui écartent le chablis. Un beau chablis, c’est frais, tranchant, aromatique, donc indispensable.

Pourquoi on l’aime 
Béru est un vrai château du XVIIIe et l’une de ses ailes fait office de cuvier, de chai. Cette production dynastique n’a jamais changé de main et c’est Athénaïs de Béru, énième représentante d’une famille en place depuis quatre siècles, qui est l’œnologue en charge des vins.

Combien et combien 
500 magnums. 45 euros le magnum

Avec qui, avec quoi 
Avec tout ce qui nécessite de la pureté, du vif, du goût. Des meilleures huîtres aux plus raffinés des poissons. Et les amateurs qui vont bien avec ce programme.

Il ressemble à quoi 
Aux coteaux qui l’ont vu naître. Il y a de la nature et du vrai, du complexe et de la rigueur. Ce n’est pas un « vin de copains ».

La bonne heure du bonheur 
De l’apéritif au fromage, avec une prime aux fins de journées chaudes, c’est de saison.

Le bug 
J'aurai du boire le clos-béru, une parcelle contiguë au château qui est un peu le jardin personnel d’Athénaïs.

Ce qu’en dit le Bettane+Desseauve 
Le Bettane+Desseauve n'en dit rien pour une raison que j'ignore, mais je vais me renseigner

Le plus 
Lire aussi un bel article sur les vins de Béru (clic)


Ce texte a été publié sous une forme différente dans ENMAGNUM numéro 4. Il fait partie d'une série de onze "interviews de magnums".
Toutes les photos de la série Mes magnums sont signées Fabrice Leseigneur.

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lundi 3 octobre 2016

Mes magnums (21)
un provence rosé et bio

Château Gassier, Le Pas du Moine,
côtes-de-provence sainte-victoire 2015 




Ce qu’il fait là 
Quand on n’est pas un gros contributeur au développement du rosé en France, mais qu’on en boit, on choisit soigneusement ses vins.

Pourquoi on l’aime 
Une belle propriété d’un seul tenant au pied de la Sainte-Victoire, ce gros éléphant de pierre, tombée dans le giron du groupe Advini et qui s’est pliée à la règle. Et chez Advini, le bio est la règle.

Combien et combien 
 4 000 magnums. 27 euros le magnum.

Avec qui, avec quoi 
Avec des gens qui aiment le vin et boivent du rosé. Pas toujours simple de réunir les deux qualités.

Il ressemble à quoi 
Sans être exagérément lyrique, on peut affirmer qu’il a la tête de cette montagne de calcaire qui surplombe les vignes, une tension et une plénitude en même temps. Beau vin.

La bonne heure du bonheur 
Comme l’autre magnum de rosé de cette sélection, ce 2015 attendra l’été prochain à fond de cave. Il y gagnera et moi aussi. Si je ne l’oublie pas un an de plus. Pour voir.

Le bug 
Ce rosé donne envie d’un rouge de même provenance.

Ce qu’en dit le Bettane+Desseauve 
Nez mêlant la framboise et les agrumes, on retrouve ces accents dans une bouche équilibrée avec une finale florale épicée. 15,5/20


Ce texte a été publié sous une forme différente dans ENMAGNUM numéro 4. Il fait partie d'une série de onze "interviews de magnums".
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mercredi 28 septembre 2016

Mes magnums (20)
un lubéron rose et bio

Château La Verrerie, lubéron 2015 



Ce qu’il fait là
Oui, vraiment, qu’est-ce qu’il fait là ? Un rosé 2015, il est bien gentil, mais il file à fond de cave, on le reverra avec plaisir l’année prochaine, débarrassé du stress de sa naissance et de sa mise en bouteille, apaisé (comme dirait l’autre), délicieux. Il est d’usage de boire dans l’été la production des vins rosés de Provence. Dans la plupart des cas, il n’y a rien d’autre à faire (en ajoutant des glaçons), mais dès qu’il s’agit d’un rosé de belle origine, on l’attend au moins un an, voire deux ou trois, on y gagne toujours. Les meilleurs rosés sont tous des vins de garde.

Pourquoi on l’aime 
On l’aime comme on aime le Lubéron, comme on a pu s’attacher à en connaître chaque sentier et le Café de la Poste à Goult. Et les mas secrets au milieu des garrigues et des chênes verts, « exceptionnels avec piscine ».

Combien et combien 
4 000 magnums. 29 euros le magnum.

Avec qui, avec quoi
Avec le soleil et le ciel bleu, les amis choisis pour cet usage, la gastronomie de circonstance. Ce vin ira à peu près avec tout.

Il ressemble à quoi 
À du vin de couleur rose.
Mais du vin.
Mais rose.
Et bio.
Et, en magnum, c’est tellement mieux à regarder.

La bonne heure du bonheur 
Au zénith ou au couchant. Au bord de l’eau ou sous la treille. Ce genre d’évidences déclinées avec gourmandise, on va vite se croire dans les pages de Côté Sud.

Le bug 
La bouteille très stylish. Est-ce vraiment un bug ?

Ce qu’en dit le Bettane+Desseauve 
Joli vin plein de vivacité et de profondeur, avec une palette aromatique finement acidulée sur les agrumes et les fruits rouges. L’ensemble a de l’allant et de la vivacité. 15/20


Ce texte a été publié sous une forme différente dans ENMAGNUM numéro 4. Il fait partie d'une série de onze "interviews de magnums".
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lundi 26 septembre 2016

Mes magnums (19)
un champagne bio

Champagne Fleury, blanc de noirs brut 



Ce qu’il fait là 
Là-bas, dans l’Aube, sur la côte des Bar, on n’a pas attendu les effets de manche des gourous du naturel pour cultiver la vigne en biodynamie. Une histoire de plus de vingt ans fièrement portée par la jeune génération aujourd’hui aux commandes.

Pourquoi on l’aime 
La qualité de toute la production mériterait mille détails. Et ce pur pinot, simple brut, en est une assez parfaite illustration. Précision, droiture et parfaite digestibilité est l’avis des experts Bettane+Desseauve sur ce champagne hors du commun.

Combien et combien 
1 200 magnums. 55 euros le magnum

Avec qui, avec quoi 
Avec des amateurs de sensations, c’est le mieux.

Il ressemble à quoi 
À une leçon de champagne à l’usage de ceux qui n’aiment pas le champagne. Il y en a.

La bonne heure du bonheur 
Il est fait pour saluer le soir qui tombe et il passera à table si affinités.

Le bug 
Petite production.

Ce qu’en dit le Bettane+Desseauve 
Nez épanoui sur les fruits secs et le miel. Attaque riche, ample, bonne fraîcheur. Longueur moyenne, simple, mais plaisant, avec une légère amertume en fin de bouche. 14,5/20




Ce texte a été publié sous une forme différente dans ENMAGNUM numéro 4. Il fait partie d'une série de onze "interviews de magnums".

Voici ENMAGNUM #05, en vente chez votre marchand de journaux depuis quelques jours



 

jeudi 22 septembre 2016

Mes magnums (18)
un champagne en bio-d

Leclerc-Briant,  Réserve, champagne brut 



Ce qu’il fait là 
Une belle marque des coteaux de Champagne, reprise par un couple d’Américains intelligents qui n’ont rien altéré, au contraire, et dirigée par un passionné très concerné par ce qu’il fait et un œnologue spécialisé dans la biodynamie.

Pourquoi on l’aime 
Cette idée d’un domaine champenois en bio dès après la seconde guerre mondiale est assez ébouriffante pour donner envie d’en savoir plus. Aujourd'hui, le domaine est mené en bio-dynamie.

Combien et combien 
3 000 magnums. 75 euros le magnum.

Avec qui, avec quoi 
Avec des amateurs de champagne. Les amateurs de bulles patienteront un peu.

Il ressemble à quoi 
C’est la rencontre entre la pureté et le goût. Suffisamment rare pour mériter qu’on y retourne une fois, deux fois, trois fois, qu’on essaie les autres cuvées de la maison, les sélections parcellaires aux noms merveilleux, Les Chèvres pierreuses ou La Croisette.

La bonne heure du bonheur 
L’apéritif est un bon moment ou à la fin de tout, la nuit, quand il s’agit d’un dernier verre avant d’aller dormir.

Le bug 
C’est une marque en pleine lumière, très à la mode et reconnue par les grands amateurs, mais le niveau d’exigence est tel que la progression des volumes risque de se faire attendre.

Ce qu’en dit le Bettane+Desseauve 
Souple et frais, ce champagne est à la fois caressant et ciselé, avec une finale saline nuancée d’anis. 15/20

Ce texte a été publié sous une forme différente dans ENMAGNUM numéro 4 (le numéro 5 est en vente chez votre marchand de journaux depuis quelques jours). Il fait partie d'une série de onze "interviews de magnums".

Voici ENMAGNUM #05, en kiosque : 

lundi 19 septembre 2016

Gérard Bertrand, le bio-man du Languedoc

Gérard Bertrand dans son Clos d'Ora, entretenu comme un jardin


Sa haute stature et son air détendu très sudiste pourraient laisser croire à de la nonchalance. Mais non. Il est clair, net et précis autant qu’il est possible. Il s’y applique, soucieux qu’il est de convaincre et de transmettre une sorte de message. Gérard Bertrand est un passionné et un « partageux ». Son implication de longue date dans une viticulture la plus propre possible ne constitue pas un axe de communication, c’est plus personnel. Pour autant, il n’invoque pas la conservation de la planète de ses enfants ou, a contrario, les obligations faites par le grand commerce global. Non, du bio et de la bio-dynamie, il expose les contraintes et les résultats sans effet ni extase, assez froidement. Les faits, rien que les faits. On évite ainsi les incantations, ce n'est pas plus mal. Il faut dire qu’il n’est pas au bout du processus, mais l’objectif est fixé. Il explique que « 30 % de nos vins sont aujourd’hui bio ou en bio-dynamie, notre objectif est de passer à 50 % d’ici 2020 et 70 % voire 80 % en 2025. »

Lui, il a choisi la bio-dynamie. Sur les 600 hectares de ses domaines et châteaux, 450 sont certifiés ou en cours de conversion. On sent que c’est pour lui une démarche majeure, un engagement sûrement, mais pas une prise de tête. Pour être un vigneron passionné, il est aussi un chef d’entreprise qui fait attention à ce qu’il fait. Et 250 collaborateurs, c’est une responsabilité dont il a une conscience certaine. Alors, pour assurer le développement, Gérard Bertrand, la marque, c’est aussi 2 500 hectares de vignes sous contrats, ce qu’on appelle ailleurs des approvisionnements, dont plus de la moitié est issue de vignes menées en bio. « Cette transition est au cœur de notre histoire, assure-t-il avant de développer. Au niveau des pratiques culturales, le monde est allé trop loin, il faut introduire plus de biodiversité et respecter les éco-systèmes. Au-delà des considérations philosophiques, il y a une volonté qualitative. Avec ces méthodes, nous améliorons la fraîcheur, l’acidité et le potentiel de garde des vins, qui impriment le respect de leur terroir. » Un avis qui n’est pas loin de devenir général et qui légitime tout, à la fin. Alors, il affine : « Nous ne distinguons pas le viticulteur du paysan. Comme le rappelle Steiner, le paysan s’occupe du paysage et, donc, de la diversité. Oui, nous plantons des arbres et nous essayons de renforcer la biodiversité de la faune comme de la flore au sein de nos parcelles. » Il a créé un vignoble-modèle il y a des années. Le déjà fameux Clos d’Ora, deux millésimes sont sortis. Là, c’est un laboratoire et rien n’est épargné pour l’excellence des pratiques et là, pour une fois, Gérard Bertrand, se permet une manière de lyrisme : « Le Clos d’Ora est en biodynamie et en culture au cheval sans supports mécaniques. On essaye de recréer la connexion entre les quatre règnes : humain, minéral, animal et végétal. »

Le Clos d'Ora sous un ciel immense


Avec cette vision, Gérard Bertrand affirme des convictions très éloignées du scepticisme ambiant dans ses derniers sursauts et se sent plutôt en phase : « Aujourd’hui, le bio est devenu un sujet qui compte en France, en Allemagne et en Suisse, bien que la culture de la bio-dynamie commence tout juste à s’étendre. C’est aussi un marché et il se développe considérablement. Un marché dont la pratique lui a apporté quelques idées inhabituelles : « Les pays nordiques sont les plus concernés et, en particulier, la Suède qui a pour objectif de produire 50 % de vins bios d’ici cinq ans. Les Anglais n’y sont pas encore très sensibles et les Nord-Américains, non plus. » On aurait juré que les Américains, au contraire… Au passage et puisqu’on en parle, Gérard Bertrand décerne quelques satisfecits : « La France est exemplaire à ce sujet, c’est l’un des pays les plus en avance et ce grâce à la grande distribution qui met un puissant coup de projecteur sur les produits bios et qui crée donc une demande. C’est également la présence du label AB, qui est le même que pour les produits alimentaires, qui rassure l’amateur de bons vins. » Un discours qu’on n’a pas souvent l’occasion d’entendre.

Les photos : sont signées Fabrice Leseigneur

Ce texte a été publié sous une forme différente dans ENMAGNUM numéro 4 (le numéro 5 est en vente chez votre marchand de journaux).
 
Voici ENMAGNUM #05, en kiosque : 

 
 

mercredi 14 septembre 2016

Mes magnums (17)
un pomerol

Château Gombaude-Guillot, pomerol 2008

Ce qu’il fait là 
D’abord, il y a très très peu de châteaux certifiés bio sur le plateau de Pomerol. Ensuite, c’est le vin d’un père, d’une mère et d’un fils qui n’ont pas décidé de faire comme tout le monde. Enfin, ce cru authentiquement artisan, voire paysan, est excellent et en progrès constant. Et ceux qui le font sont d’une grande exigence et exemplarité.

Pourquoi on l’aime 
Ce 2008 est très réussi, mais on peut aussi acheter du 2011 (je l’ai fait, j'ai eu raison, c’est très bon, faites pareil).

Combien et combien 
381 magnums. 99 euros le magnum.

Avec qui, avec quoi 
Avec une paire de bons amis, des gens d’expérience qui savent bien qu’à Bordeaux, le bonheur est dans le verre et qui s’abstiendront (d’avance, merci) de commenter sur le ton « Ah bon ? Tu bois encore du bordeaux ? » Oui, encore.

Il ressemble à quoi 
C’est un vin sage, rien d’excentrique. Pour ça, pour la rigolade, Olivier (le fils) a créé Pom’n Roll, gros chouchou de Thierry Desseauve. Moi, je préfère son grand pomerol.

La bonne heure du bonheur 
À table et nulle part ailleurs, avec quelques finesses de la gastronomie familiale, ce mélange quasi régressif de simplicité et de souvenirs.

Le bug
No bug.

Ce qu’en dit le Bettane+Desseauve 
Nez floral, avec des touches de fruits rouges, la bouche a de l’étoffe, de l’élégance et du soyeux avec un retour de violette. 15/20




Ce texte a été publié sous une forme différente dans ENMAGNUM numéro 4 (le numéro 5 est en vente chez votre marchand de journaux depuis quelques jours). Il fait partie d'une série de onze "interviews de magnums".

Voici ENMAGNUM #05, en kiosque : 

 

lundi 12 septembre 2016

Les Zusslin, c'est pas du cinéma

Il ne faisait pas chaud ce matin là sur le coteau du clos Liebenberg, sous la chapelle des Sorcières


Le pitch 
Une sœur et son petit frère font du vin en Alsace dans le domaine familial depuis 2000, seize hectares en biodynamie. Les vins sont plus qu’excellents et les acteurs très sympathiques. Cerise sur le gâteau, ils vendent leurs vins plutôt plus cher que la moyenne et ça marche. La belle histoire.

Le décor 
Nous voilà à Orschwihr, délicieux village alsacien accroché à son coteau qui forme comme un cirque, presque un amphithéâtre, à quinze minutes de Colmar ou de Mulhouse. Le village fait face à la colline du Bollenberg, coiffée d’une chapelle dite « des sorcières ». Ils nous expliquent qu’ici, on a beaucoup brûlé les sorcières et que c’est bien dommage parce qu’on a perdu la mémoire de nombreuses pratiques alternatives. Ah oui, on peut voir les choses comme ça. Vers l’est, la vallée ouvre sur la plaine d’Alsace. Les vignes occupent l’espace, cernées ici et là par de sombres forêts et des ruches bourdonnantes pour rappeler au passant que la viticulture est propre. Pour se faire une idée plus complète, on se souvient que ce bout d’Alsace est une zone parmi les plus sèches de France, l’équivalent de Narbonne. Surprenant.

Le casting 
Marie Zusslin, la sœur, l’aînée. Une énergie dans un gant de velours, en charge de la commercialisation des vins et, bien sûr, de la comm’. Jean-Paul Zusslin, le frère, petit génie de la viticulture et vinificateur hors pair. Tous les deux représentent la treizième génération de cette dynastie vigneronne. Autour d’eux, dix personnes. Le personnel a doublé depuis que le vignoble est mené en biodynamie. On ne fait pas dans le vin économique chez les Zusslin. Il y a aussi Sésame, un comtois, pour les labours dans les vignes. Et un autre cheval, un selle français réformé des courses, pour que Sésame ne s’ennuie pas.

La production
C’est le père de Marie et Jean-Paul qui a converti le vignoble familial à la biodynamie dès 1977. Un précurseur compris par ses enfants qui ont poussé le concept jusqu’au bout et pour lesquels le bio n’est pas seulement une pratique culturale, mais un mode de vie tout entier, alimentation et linge de lit compris. À la vigne, on pousse fort aussi. Plus d’insecticides, même bio, depuis 2008, mais des nichoirs pour les mésanges qui font le boulot à la place des -cides. Et pour la bio-diversité, ils ont planté des poiriers palissés autour des parcelles.

Les répliques cultes 
– « On a toujours eu un stock important, c’est une culture familiale à cause des aléas climatiques. Ma grand-mère disait qu’il faut toujours avoir une récolte à la banque et, dès qu’elle avait trois sous, elle achetait de la terre. »
– « On ne fait pas nos courses à l’hyper, donc on ne leur vend pas de vin. »
– « Ici, l’électricité est verte. Éolien, photo-voltaïque, station biogaz (déchets organiques en fermentation, ndlr), hydro-électrique. Ce qui représente 100 % de la consommation du domaine. Pour être cohérent, on agit tous les jours, mais on ne va pas aux manifs. »
– « La biodynamie, ça marche si on comprend comment fonctionne un sol. On ne soigne pas un drogué à l’homéopathie. »
– « Une biodynamie consciencieuse fonctionne très vite dans les vins. »
– « Quand on reprend une vigne qui a été menée en conventionnel, on attend quelques années avant d’assembler les vins de ces vignes avec le vin des nôtres. Le temps que la vigne reprenne ses esprits. »
– « Au fur et à mesure des dégustations, nous décidons si on sulfite ou pas. Parfois, on arrive à embouteiller sans soufre. Mais nous ne prenons pas de risques avec nos clients. Nous ne livrons jamais de vins déviants. »

La bande-annonce 
Il y a deux vins incontournables pour comprendre les Zusslin et évaluer leur niveau d’exigence qualitative. Un effervescent d’abord, un crémant d’Alsace d’une pureté folle, un brut zéro (non dosé) issu du clos Liebenberg et distribué uniquement chez les étoilés de la belle restauration, 32,50 euros. Ah quand même. Le second est un pinot noir, le Bollenberg cuvée Harmonie, qui décoiffe tout ce qui se fait dans le genre et dans le monde, mais qu’on attendra sagement quelques années pour toucher du bout de la langue une idée du paradis. À 54 euros, le paradis. Mais si ces deux-là faisaient des vins moyens, ils ne les vendraient pas à ce prix-là. Une fois ces vins goûtés, on peut enfin se tourner vers leurs grands rieslings et leurs immenses Vendanges tardives et Sélection de grains nobles.

Nomination
En 2014, le guide Bettane+Desseauve sacre les Zusslin du titre envié de « Révélation de l’année ». Cette année là, ils partagent le haut de l’affiche avec Michel Chapoutier (Homme de l’année), Margaux (Appellation de), Domaine Ganevat (Vin de). Il y a du niveau, comme on dit dans les émissions sportives.


La photo : est signée Mathieu Garçon

Ce texte a été publié sous une forme différente dans ENMAGNUM numéro 4 (le numéro 5 est en vente chez votre marchand de journaux).
 
Voici ENMAGNUM #05, en kiosque demain : 

 

dimanche 11 septembre 2016

Mes magnums (16)
un bandol rouge

La Bastide blanche, cuvée Fontaniou, bandol 2004 



Ce qu’il fait là 
On ne boit pas assez de bandols. Pourtant la gamme est large et chaque domaine a des millésimes (un peu) anciens à vendre. Et un grand mourvèdre est une absolue sublimité. Ici, dans une version classique ; ailleurs, dans des élaborations un peu plus modernes ; toujours un moment rare.

Pourquoi on l’aime 
On l’aime parce qu’on aime les rouges de Provence, production de plus en plus confidentielle, la région se consacrant à corps perdu au rosé. Et quel dommage.

Combien et combien 
4 200 magnums. 66,50 euros le magnum.

Avec qui, avec quoi 
Avec des amateurs de vins fins, aux épices complexes, la Méditerranée au fond de ton verre, les oh et les ah qui ponctuent la bouteille vide.

Il ressemble à quoi 
Il ressemble aux vallées de Bandol, couvertes de vignes qui descendent vers le port. Il est un peu le coin caché dans une cave, celui plein de vins d’amateurs.

La bonne heure du bonheur 
Évidemment à table, de préférence le soir. Ce n’est pas un « petit vin léger », ce fantasme idiot de la bistronomie parisienne.

Le bug 
Des 2004, il n’y en aura bientôt plus. Mais veillons sur les 2007.

Ce qu’en dit le Bettane+Desseauve 
Voici un bandol classique qui a atteint son apogée, il offre des arômes intenses et savoureux de mûres et d’épices, un vin puissant qui allie structure et moelleux. Il fera merveille à table avec une daube de bœuf ou d’agneau. 15/20



Ce texte a été publié sous une forme différente dans ENMAGNUM numéro 4 (le numéro 5 est en vente chez votre marchand de journaux à partir de demain). Il fait partie d'une série de dix "interviews de magnums".

Voici ENMAGNUM #05, en kiosque demain : 



 

vendredi 9 septembre 2016

EN MAGNUM #05 (l'aventure continue)

Le bel assemblage de photos extraordinaires et d’articles aussi passionnants que pédagogiques confirme toutes les intentions de ses concepteurs avec un numéro 5 fort et très documenté.
Comme toujours, s’agissant de Bettane+Desseauve, le lecteur se passionnera pour les prises de position sans concession, les opinions tranchées et la qualité des commentaires de dégustation.
Bref, il se passe quelque chose d’intéressant dans la presse Vin.

Pour découvrir le sommaire, cliquez (clic)



Le numéro 5 est en vente chez votre marchand de journaux à partir d’aujourd’hui. 


jeudi 8 septembre 2016

Mes magnums (15)
un languedoc

Domaine Le Conte des Floris, cuvée Homo Habilis,
languedoc-pézenas 2011 




Ce qu’il fait là 
Sans chercher à forcer la main de quiconque, il est grand temps de se pencher à nouveau sur ce que le Languedoc veut nous dire de plus intéressant. Nous avons commencé dans le dernier numéro de En Magnum, nous continuons ici.

Pourquoi on l’aime 
« La majorité des meilleurs domaines languedociens ont été créés par des passionnés venus d’ailleurs réaliser leur idéal du grand vin. » C’est Bettane qui parle de Catherine et Daniel Le Conte des Floris, en rédemption à Pézenas après une vie dans la communication et la politique.

Combien et combien 
600 magnums. 48 euros le magnum.

Avec qui, avec quoi 
On reconnaît un vin intelligent à sa capacité de s’accommoder de tout, ou presque. Viande et poisson ? Oui.

Il ressemble à quoi 
Un bel assemblage syrah, mourvèdre, grenache, c’est racé et c’est complexe. Il passe trois ans et demi au chai avant d’être embouteillé et mis sur le marché. Tout le monde n’est pas aussi exigeant.

La bonne heure du bonheur 
Parfait vin de table, à déjeuner ou pour dîner, avec ce qu’il faut de fins palais. Prévoir largement.

Le bug 
Ce n’est pas encore en vente partout (mais ça commence)

Ce qu’en dit le Bettane+Desseauve
La cuvée change, elle incorpore pour la première fois 50 % de beaux mourvèdres qui lui apportent leur supplément de race et de complexité. Elle est sublimée par des notes de mine de crayon, une des caractéristiques des syrahs sur schistes. 17/20



Ce texte a été publié sous une forme différente dans ENMAGNUM numéro 4 (le numéro 5 est en vente chez votre marchand de journaux à partir de demain). Il fait partie d'une série de dix "interviews de magnums".

Voici ENMAGNUM #05, en kiosque demain : 



mercredi 24 août 2016

Le tableau d'honneur
du Bettane+Desseauve 2017

Véritable Hall of Fame de la production viticole française, le Bettane+Desseauve 2017 paraît le 31 août. Cette onzième édition consacre, comme chaque année, celles et ceux qui ont su porter plus haut la qualité de leurs vins.

Les lauréats sont :

Personnalité de l’année 
Pierre Trimbach
Extrait :
 « Les grandes cuvées de Trimbach sont présentes sur toutes les grandes tables, étoilées ou pas, les rieslings frédéric-émile ou clos-sainte-hune en tête, mais aussi le gewurztraminer seigneurs-de-ribeaupierre figurent parmi les plus grandes expressions de la région. La force de Trimbach consiste aussi à ne pas négliger les entrées de gamme, dès le splendide riesling-réserve, un vin de carafe comme on aimerait en boire dans tous les bons bistrots. »

Vin de l’année 
Château-coutet, premier cru classé de Barsac 2015
Extrait :
« Les équipes d’Yquem, de Climens, de Suduiraut, de Coutet, de Guiraud, de Clos-Haut-Peyraguey, de Rieussec, de Lafaurie-Peyraguey et de tant d’autres, pleinement soutenues par leurs propriétaires, cultivent, vendangent, vinifient, élèvent et mettent en bouteille avec un perfectionnisme inconnu auparavant. Inspirées par la magie d’un produit incomparable, elles se dévouent à leur tâche comme jamais dans l’histoire. Avec à la clé des vins d’une pureté immédiate de fruit et une mise en valeur des spécificités du terroir à citer en exemple à la viticulture mondiale. »

Révélation de l’année 
L’émergence flamboyante de Château Les Carmes Haut-Brion
Extrait :
« Depuis le premier millésime réalisé par cette nouvelle équipe, le cru n’a cessé de progresser de manière spectaculaire. Si 2013 et 2014 sont des vins charnus, fins et profonds, 2015 s’impose carrément comme l’un des meilleurs bordeaux du millésime. Et 2016 sera le premier à être vinifié dans le flamboyant chai imaginé par le designer Philippe Starck. »

Progression de l’année 
Thierry Germain et son Domaine des Roches neuves
Extrait :
« Des chenins secs brillants de fraîcheur, de subtilité, de classe, qui surpassent (tout en restant de prix modeste) bien des bourgognes blancs surfaits – y compris dans un style qui se veut semblable et qui ne convient ni à leur terroir, ni à leur cépage – et des cabernets francs d’une droiture et franchise de fruit qui fixent de nouveaux critères pour toute la région. »

Signature de l’année 
AdVini
Extrait :
« Notre signature de l’année n’est pas de celle que vous retrouverez griffée sur l’étiquette d’une bouteille. AdVini est le nom d’un groupe et, à la manière d’un LVMH du vin, n’a pas vocation à prendre la place des maisons qu’il regroupe et chapeaute, mais son histoire est suffisamment singulière et excitante pour qu’elle mérite d’être ici saluée auprès des amateurs. »

Vignoble de l’année 
L’appellation Corse-Calvi
Extrait :
« Le talent, l’immédiateté du plaisir et la précision du travail caractérisent dans les trois couleurs les différents styles des meilleurs producteurs (…) Depuis dix ans, d’un millésime sur l’autre, cette petite bande obtient une régularité de réussite qu’on est loin de connaître dans d’autres secteurs de l’île de Beauté. »



Guide des vins Bettane + Desseauve 2017
960 pages, 9 800 vins (et 2 190 vins supplémentaires sur le site web),
24,90 euros, Flammarion.